Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

mercredi 11 mars 2015

Convertir les compétences en notes : ça donne quoi ?

Sur la dernière évaluation de troisième, j'ai décidé de comparer la note obtenue de façon sommative, en respectant une notation type brevet, et la note obtenue à partir des scores d'acquisition de compétences à partir du logiciel que j'utilise, SaCoche.

Cette évaluation portait sur les probabilités, mais comme à chaque fois il y avait des exercices sur d'autres thèmes. Comme c'est une évaluation pour le contrôle continu du DNB, elle était composée uniquement d'exercices issus des annales de brevet.
J'avais secoué mes élèves peu avant, car ils n'ont guère d'énergie dans le travail, et j'avais eu l'impression d'une réaction. Modérée, mais réelle. J'avais donc décidé de leur proposer aussi des exercices de brevet accessibles à ceux qui n'ont pas beaucoup bossé depuis deux ans (au moins) mais qui ont la volonté de résoudre ces exercices.

Voici mon sujet :


Les élèves se sont bien investis pendant l'évaluation. Le seul élève que je n'arrivais pas à mettre au travail a cherché aussi et m'a rendu une copie plus étoffée que d'habitude. La moyenne sommative, de 10,7/20, est au final supérieure de 2 points à ce que j'obtiens d'habitude.
Mais là n'est pas mon propos : je veux comparer deux types d'évaluation.

Voici à quoi ressemble un bilan SaCoche :


On n'est pas obligé d'indiquer les seuils de réussite sous forme numérique, ni la moyenne pondérée des scores. Mais cette fois je le souhaitais pour établir ma comparaison.

Dans la feuille tableur qui suit, j'ai reporté, avec des prénoms fictifs, les notes obtenues en sommatif, et les notes obtenues grâce aux synthèses comme celle ci-dessus: 



Que contate-t-on ?

  • En terme de moyenne, les résultats sont très proches.
  • Pour la majorité des élèves, les écarts sont inférieurs à un point.
  • La notation par compétences est légèrement inférieure. Cela me surprend car on entend souvent dire qu'on évalue de façon plus "positive", "bienveillante", voire "laxiste" par compétences. Ici, ce n'est pas le cas.
  • A peu près autant d'élèves ont un écart positif ou négatif entre les deux notes.
  • Les écarts importants concernent plutôt des élèves obtenant d'assez ou de très bonnes notes. C'est logique, car ces élèves produisent davantage de matière à évaluer.


A présent, penchons-nous sur trois cas particuliers : Emelyne, Leïla et Victor.

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Emelyne est une élève dyslexique et lente à l'écrit. Elle est parfois en difficulté dans la compréhension des consignes, que je lui reformule souvent pour lui permettre de traiter l'exercice et pour lui montrer quels sont les éléments importants à repérer dans le texte. Emelyne est aussi une élève très sérieuse et volontaire.
Elle obtient 13,5/2à en sommatif, mais 11/20 d'après les compétences.
Dans son cas, cela s'explique par cette partie des compétences que j'avais sélectionnées :


Emelyne a réussi toutes les questions d'application, de connaissances ou de techniques à appliquer directement. Elle est sérieuse, elle s'est entraînée, elle sait reproduire. Sa compréhension profonde de ce qu'elle applique n'est pas certaine, mais elle compense son handicap de façon efficace. Comme la notation type brevet cherche à valoriser le positif de chaque question, elle accumule davantage de points.
En revanche, la dyslexie d'Emelyne rend difficile la validation des compétences liées à l'interprétation de consignes, l'argumentation, le traitement de tâches complexes. Ce qui se ressent par la différence des deux scores.

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Leïla est une élève très motivée, curieuse, enthousiaste et intuitive. Elle participe beaucoup en classe, et de façon efficace. Elle fournit en revanche à l'écrit de travaux très confus, voire franchement sales. Réaliser une figure propre, ne pas écrire dans tous les sens, en rajoutant après coup des corrections ou en raturant avant d'entourer finalement le résultat barré, ou utilises les notations correctes, sont des objectifs difficiles à atteindre pour elle. Elle n'est pas repérée comme telle, mais présente des éléments proches de la dyspraxie.
Leïla obtient 2,6 points de plus par les compétences que par le sommatif.
En évaluant par compétences, j'ai pu observer que Leïla avait compris la plupart des méthodes. Au travers de sa rédaction, elle montre très clairement une compréhension fine et une volonté de communiquer. Mais de façon plus rigoureuse, ses résultats ou la façon de les formuler sont parfois faux ou maladroits. C'est assez frustrant : elle a compris mais trébuche sur des "bêtises" qui la font halluciner une fois la copie corriger en main.
Ici, l'évaluation par compétences lui profite car elle valorise sa compréhension et atténue se maladresses.

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Victor est un élève motivé, mais dont la motivation n'est pas ordinaire. Victor a quelque chose à se prouver, veut réussir pour être reconnu et a un sacré caractère. C'est une personnalité intéressante, quelqu'un d'à la fois explosif et constructif, raisonné et obstiné.
Victor a aussi une vie sociale très développée, et le collège c'est important, mais la vie est aussi ailleurs.
Alors Victor écoute en classe, réfléchit, participe, mais au final ne fait que ce qu'il pense devoir faire, quoi qu'en dise le professeur. Et si le professeur demande de rédiger, lorsqu'on applique le théorème de Thalès, en énumérant rigoureusement les hypothèses pour justifier du bien-fondé de son utilisation, et bien il est gentil, le professeur, mais c'est trop long et inutile puisqu'en effet on peut l'utiliser, ce fichu théorème. Pour Victor, la clef de voute du raisonnement n'est pas son "enrobage" mais le calcul qui en résulte.
Du coup, Victor n'a pas validé les compétences qu'Emelyne n'avait pas validées non plus, même si ces raisons sont bien différentes.
Victor, d'autre part, n'aime pas les pourcentages. C'est comme ça et c'est tout. Du coup, Victor n'a pas résolu certaines parties de questions, qui représentaient peu de points mais que j'avais décomposées précisément et donnaient lieu à plusieurs compétences. Ces questions se trouvent évaluées de façon très différentes par les deux systèmes, d'un point de vue de leur pondération par rapport à l'ensemble du sujet.
En fait, Victor connaît bien le système sommatif et sait en jouer.

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Quelles que soient ces observations, elles ne sont fondées que sur une évaluation. Je compte réitérer l'expérience pour voir si ces tendances se confirment. Je suis curieuse de voir si les mêmes élèves présenteront des écarts importants.

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