Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

samedi 30 janvier 2016

C'est de la manipulation ?

Hier à l'ESPE, nous avons eu un débat intéressant avec mes étudiants. Nous réfléchissions à des EPI mettant en jeu les maths. Bon, déjà, c'est assez stupéfiant de voir comme les futurs jeunes collègues s'approprient l'exercice sans se prendre le chou. Même lorsque je leur ai demandé si "ils ne trouvaient pas ça fumeux", si "ils avaient quand même l'impression de faire des maths", si "ils se voient mettre tout ça en oeuvre en vrai", ils sont restés calmes et ont répondu "ben oui, pourquoi pas ?". Nous avons discuté un moment de ce qu'est "faire des maths", et de ce qu'est "enseigner les maths", ce qui était fort intéressant, mais ce n'est pas là mon propos du jour.

Mon propos du jour, c'est celui-ci : peut-on enseigner sans manipuler ?

Cette question est arrivée sur le tapis assez naturellement : un étudiant exposait son idée d'EPI. Un EPI de troisième, impliquant les maths, la physique et la SVT, sur les médicaments. Son travail, intitulé MathsMédoc, visait à faire réfléchir les élèves à "Comment déterminer si un médicament est efficace ? Si il est dangereux ?". Dans le contenu, sa proposition était bien ficelée, riche, réaliste et pourtant ambitieuse. Mais surtout, en présentant à l'oral, l'étudiant a surtout insisté sur l'homéopathie (même si en fait son propos était plus complexe que juste celui-là). Il voulait amener les élèves à "comprendre" que l'homéopathie est une supercherie. Cet étudiant était bien persuadé de cette thèse, arguments scientifiques à l'appui.

Le Figaro
Or, parmi les étudiants, d'autres n'étaient pas d'accord. L'inefficacité de l'homéopathie n'est pas un leurre, selon eux, puisqu'ils ont testé eux-même ses bienfaits. Ou encore, pour d'autres, parce que même si c'est l'effet placebo qui est en "cause", il permet d'aller mieux quant à certains maux.


La Recherche
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Evidemment, chacun est reparti avec les mêmes convictions sur l'homéopathie. Mais surtout, les étudiants eux-mêmes en sont arrivés à s'interroger sur la frontière entre "faire réfléchir" et "influencer". Et c'est vrai que c'est bien compliqué. Qu'avons-nous, enseignants, le "droit" de dire, de faire ? Jusqu'où aller dans les analyses, les conclusions ?

C'était une discussions vraiment intéressante, car nous avions tous conscience d'avoir des convictions que nous ne ressentons pas comme des croyances, mais comme des vérités.
En tant qu'enseignants de mathématiques, on pourrait penser que nous sommes moins exposés au subjectif et à l'exposition d'opinions. Pourtant, non. Lorsque nous travaillons les stats, les probas, l'analyse de données en général, mais aussi les autres domaines, à partir d'exemples concrets, il est fréquent que nous nous retrouvions devant l'envie d'interpréter nos résultats sur le plan humain. Le faire, à mon sens, n'est pas si grave si nous nous en tenons aux lois, que nous respectons l'éthique, que nous bannissons toute intolérance, et que nous précisons que ce n'est qu'une opinion, en en présentant d'autres.

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